Un essai clinique réalisé dans plusieurs pays vient de se terminer. Bien que n’ayant pas montré d’effet favorable sur l’adrénomyéloneuropathie, il apporte des éléments de réflexion pour le traitement de l’adrénoleucodystrophie cérébrale. En effet, aucun patient ayant reçu le médicament n’a développé d’atteinte cérébrale au cours de l’essai, contrairement aux hommes du groupe placébo.

La plupart des adultes ayant le gène de l'adrénoleucodystrophie développe une myélopathie chronique, l’adrénomyéloneuropathie, qui débute généralement avant la trentaine. L'adrénomyéloneuropathie se caractérise par des dommages axonaux graves et continus dans le système nerveux centrale et périphérique, et entraine en particulier une raideur à la marche et des troubles de l’équilibre.

L’adrénoleucodystrophie cérébrale (cALD) est une inflammation agressive du cerveau. Elle touche 30 à 40% des garçons âgés de 4 à 8 ans nés avec une mutation du gène ABCD1. Les hommes avec une adrénomyéloneuropathie développent également une adrénoleucodystrophie cérébrale pour plus de la moitié d’entre eux.


Sécurité et efficacité de la lériglitazone pour prévenir la progression de la maladie chez les hommes atteints d'adrénomyéloneuropathie (ADVANCE) : essai de phase 2-3 randomisé en double aveugle, multicentrique et contrôlé par placebo

Wolfgang Köhler, Marc Engelen, Florian Eichler, Robin Lachmann, Ali Fatemi , Jacinda Sampson, Ettore Salsano, Josep Gamez, Maria Judit Molnar, Sílvia Pascual, Maria Rovira, Anna Vilà, Guillem Pina, Itziar Martín-Ugarte, Adriana Mantilla, Pilar Pizcueta, Laura Rodríguez-Pascau, Estefania Traver, Anna Vilalta, María Pascual, Marc Martinell, Uwe Meya, Fanny Mochel, and the ADVANCE Study Group

Contexte

Les patients adultes atteints d'adrénoleucodystrophie ont un pronostic dégradé en raison du développement de l'adrénomyéloneuropathie. De plus, une grande proportion de patients atteints d'adrénomyéloneuropathie développe une adrénoleucodystrophie cérébrale progressive menaçant le pronostic vital. La lériglitazone est un nouvel agoniste sélectif du récepteur gamma activé par les proliférateurs de peroxysomes, qui régule l'expression de gènes clés contribuant aux processus neuro-inflammatoires et neurodégénératifs impliqués dans la progression de l'adrénoleucodystrophie. Notre objectif était d'évaluer l'effet de la lériglitazone sur les marqueurs cliniques, d'imagerie et biochimiques, marqueurs de la progression de la maladie chez les adultes atteints d'adrénomyéloneuropathie.

Méthodes

ADVANCE était un essai de phase 2-3 de 96 semaines, randomisé, en double aveugle, contrôlé par placebo, réalisé dans dix hôpitaux en Allemagne, en Espagne, aux États-Unis, en France, en Hongrie, en Italie, aux Pays-Bas, et au Royaume-Uni. Des hommes capable de marcher, âgés de 18 à 65 ans atteints d'adrénomyéloneuropathie sans lésions rehaussées par le gadolinium, qui suggèrent une adrénoleucodystrophie cérébrale progressive, ont été randomisés (2:1 sans stratification) au moyen d'un système de réponse interactif et d'une séquence générée par ordinateur, pour recevoir des suspensions orales quotidiennes de lériglitazone (dose initiale de 150 mg ; entre l'inclusion et la semaine 12, les doses ont été augmentées ou diminuées pour atteindre des concentrations plasmatiques de 200 μg·h/ml [ET 20 %]) ou un placebo. Les investigateurs et les patients ne connaissaient pas l'affectation des groupes. Le critère principal d'évaluation de l'efficacité était le changement de la distance parcourue par rapport à la ligne de base, lors d’un test de marche de six minutes réalisé à la semaine 96, analysé sur l’échantillon complet d'analyse par un modèle mixte à mesures répétées, avec le maximum de vraisemblance restreint et la valeur de base comme covariables. Les événements indésirables ont également été évalués dans l'ensemble complet d'analyse. Cette étude a été enregistrée auprès de ClinicalTrials.gov, NCT03231878 ; l'étude primaire est terminée ; les patients avaient la possibilité de poursuivre le traitement dans le cadre d'une extension ouverte (NDLR : accès ouvert au traitement, en contraste avec l’essai réalisé en double aveugle), qui est en cours.

Résultats

Entre le 8 décembre 2017 et le 16 octobre 2018, sur 136 patients présélectionnés, 116 ont été assignés au hasard ; 62 [81%] des 77 patients recevant la lériglitazone et 34 [87%] des 39 patients recevant le placebo ont terminé le traitement. Il n'y avait pas de différence entre les groupes concernant le critère d'évaluation principal (moyenne [écart-type] par rapport à l'inclusion lériglitazone : −27·7 [41·4] m ; placebo : −30·3 [60·5] m ; différence moyenne des moindres carrés -1·2 m ; IC à 95% -22·6 à 20·2 ; p=0·91). Les effets indésirables les plus fréquents apparus sous traitement dans les groupes lériglitazone et placebo étaient la prise de poids (54 [70 %] sur 77 contre neuf [23%] sur 39 patients, respectivement) et l'œdème périphérique (49 [64%] sur 77 contre sept [18%] sur 39). Il n'y a eu aucun décès. Des événements indésirables graves liés au traitement sont survenus chez 14 (18%) des 77 patients recevant de la lériglitazone et chez dix (26%) des 39 patients recevant le placebo. L'événement indésirable grave apparu sous traitement le plus courant, l'adrénoleucodystrophie cérébrale cliniquement progressive, s'est produit chez six [5%] des 116 patients, qui appartenaient tous au groupe placebo.

Interprétation

Le critère d'évaluation principal n'a pas été atteint, mais la lériglitazone a été généralement bien tolérée et les taux d'événements indésirables étaient conformes au profil d'innocuité attendu pour cette classe de médicaments. La découverte selon laquelle l'adrénoleucodystrophie cérébrale, un événement mettant en jeu le pronostic vital des patients atteints d'adrénomyéloneuropathie, ne s'est produite que chez les patients du groupe placebo justifie une enquête plus approfondie visant à déterminer si la lériglitazone pourrait ralentir la progression de l'adrénoleucodystrophie cérébrale.

Financement : Minoryx Therapeutics

Référence : Köhler, W., Engelen, M., Eichler, F., Lachmann, R., Fatemi, A., Sampson, J., Salsano, E., Gamez, J., Molnar, M.J., Pascual, S., et al. (2023). Safety and efficacy of leriglitazone for preventing disease progression in men with adrenomyeloneuropathy (ADVANCE): a randomised, double-blind, multi-centre, placebo-controlled phase 2-3 trial. Lancet Neurol. 22, 127–136

La maladie

Le syndrome CACH (Childhood Ataxia with Central nervous system Hypomyelination) est une maladie génétique rare de la famille des leucodystrophies hypomyélinisantes, appelée également leucoencéphalopathie avec perte de substance blanche VWM (leukoencephalopathy with Vanishing White Matter). Elle se caractérise par une dégradation progressive de la substance blanche au niveau du cerveau, entrainant différents troubles cognitifs et des raideurs musculaires. Ces troubles peuvent d’abord passés inaperçus ce qui rend le diagnostic précoce difficile. Lorsque la suspicion est élevée, le diagnostic peut être confirmé par des tests génétiques. La maladie se manifeste souvent dès la petite enfance mais certains patients ne présentent les symptômes qu’à l’âge adulte. Il n’existe pas de traitement à ce jour, seul un traitement symptomatique peut être mis en place.

Un espoir pour les familles

Les équipes de recherche travaillent depuis des années à accélérer le diagnostic, comprendre les mécanismes de la maladie, trouver de nouveaux marqueurs, aller vers de nouvelles thérapies, et améliorer la gestion des patients.
L’équipe de Marjo van der Knaap au VUmc (Center for White Matter Disorders of the VU University Medical Center in Amsterdam, the Netherlands) s’intéresse aux leucodystrophies, mais aussi au syndrome de CACH spécifiquement depuis plusieurs années. Le gène associé à cette maladie a été identifié par l’équipe en 2001 et depuis ces 20 dernières années, avec le soutien d’ELA, les chercheurs se sont concentrés sur la compréhension des mécanismes de la maladie. Grâce à ces recherches, une molécule prometteuse a été identifiée qui pourrait améliorer la condition de ces patients. Cette molécule, le guanabenz, est commercialisée depuis de nombreuses années aux Etats Unis et en Europe pour le traitement de l’hypertension chez les adultes. Il agit sur la réponse au stress cellulaire (mécanisme de défense de la cellule) qui est en cause dans le syndrome CACH.
L’équipe de chercheurs portée par Marjo van der Knaap (ms.vanderknaap@amsterdamumc.nl) a mis en place une étude clinique dont l’objectif est de tester le plus rapidement possible l’efficacité de la molécule dans la maladie.

Qui peut participer à l’étude ?

Un patient est éligible pour participer à l'essai s'il répond aux critères suivants:

  • VWM génétiquement prouvé
  • anomalies de l'IRM cérébrale compatibles avec VWM
  • un durée maximale de maladie de 8 ans, au moment de l'entrée dans l’étude
  • la maladie VWM a commencé avant l'âge de 6 ans
  • capable de se lever et de marcher au moins 10 pas, avec ou sans soutien
  • ne pas souffrir d'une autre maladie importante (par exemple Maladie cardiaque, hépatique ou rénale)
  • ne pas participer à une autre étude médico-scientifique
  • être capable de passer un examen IRM (c.-à-d. Pas de présence d'implants contenant du métal, tels qu'un implant de cochlée, un neurostimulateur ou un stimulateur cardiaque)
  • vivre à une distance raisonnable d'Amsterdam

Lorsque tous ces critères d'éligibilité sont remplis, le processus d'évaluation de la possibilité pour l'enfant de participer à l'essai peut commencer .

Les parents / tuteurs ou les médecins traitants peuvent contacter les équipes cliniques à TreatVWM@amsterdamumc.nl pour discuter de la possibilité pour l'enfant de participer à l'essai.

ELA international soutient cet essai et contribue financièrement à hauteur de 500 000 €. Cette étude est ouverte depuis le 1erjuin et sera menée sur au moins 1 an. Elle pourra s’étendre à 3 ou 4 ans en fonction de la progression du recrutement, prévu à 20 patients.

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En accompagnant les cliniciens et les chercheurs qui travaillent sur les leucodystrophies, ELA s’inscrit une nouvelle fois dans le développement de la recherche à l’international. Les recherches doivent continuer pour améliorer la compréhension de la maladie et pour développer des traitements spécifiques. Ce premier essai clinique sur CACH représente un réel espoir pour ces patients et leur famille.

Un essai clinique réalisé dans plusieurs pays vient de se terminer. Cet essai, dit de « phase 2-3 ouverte », vient confirmer les résultats obtenus en 2009 en France par les équipes de Patrick Aubourg et de Nathalie Cartier. Florian Eichler, principal investigateur de l’étude, nous présente les résultats :

“Thérapie génique des cellules souches hématopoïétiques pour l’adrénoleucodystrophie cérébrale”
« L’adrénoleucodystrophie (ALD) cérébrale touche 30 à 40% des garçons âgés de 4 à 8 ans nés avec une mutation du gène ABCD1. Ces garçons atteints d’ALD commencent rapidement à perdre la marche et la parole. Dans le New England Journal of Medicine, les chercheurs viennent de décrire un essai clinique utilisant un lentivirus pour infuser une copie normale du gène ABCD1 dans la moelle osseuse de garçons atteints d’ALD. La protéine corrigée a arrêté la progression de la maladie. C’est le premier traitement efficace de thérapie génique permettant l’arrêter d’une maladie cérébrale fatale. »

Thérapie génique des cellules souches hématopoïétiques pour l’adrénoleucodystrophie cérébrale

Florian Eichler, M.D., Christine Duncan, M.D., Patricia L. Musolino, M.D., Ph.D., Paul J. Orchard, M.D., Satiro De Oliveira, M.D., Adrian J. Thrasher, M.D., Myriam Armant, Ph.D., Colleen Dansereau, M.S.N., R.N., Troy C. Lund, M.D., Weston P. Miller, M.D., Gerald V. Raymond, M.D., Raman Sankar, M.D., Ami J. Shah, M.D., Caroline Sevin, M.D., Ph.D., H. Bobby Gaspar, M.D., Paul Gissen, M.D., Hernan Amartino, M.D., Drago Bratkovic, M.D., Nicholas J.C. Smith, M.D., Asif M. Paker, M.D., Esther Shamir, M.P.H., Tara O’Meara, B.S., David Davidson, M.D., Patrick Aubourg, M.D., et David A. Williams, M.D.

CONTEXTE

Dans l’adrénoleucodystrophie liée à l’X, des mutations dans le gène ABCD1 entraînent une perte de fonction de la protéine ALD. L’adrénoleucodystrophie cérébrale est caractérisée par une démyélinisation et une neurodégénérescence. La progression de la maladie, qui conduit à la perte de la fonction neurologique et au décès, ne peut être interrompue qu’avec une greffe allogénique de cellules souches hématopoïétiques.

METHODES

Nous avons recruté des garçons atteints d’adrénoleucodystrophie cérébrale dans le cadre d’une étude d’innocuité et d’efficacité de phase 2-3 ouverte, à un seul bras. Lors de leur sélection, les patients devaient être à un stade précoce de la maladie et présenter un signal à l’imagerie par résonance magnétique (IRM) avec l’agent de contraste gadolinium. La thérapie expérimentale impliquait la perfusion de cellules CD34 + autologues transduites avec le vecteur lentiviral elivaldogene tavalentivec (Lenti-D). Dans cette analyse intermédiaire, les patients ont été évalués pour l’apparition de la maladie du greffon contre l’hôte, le décès, et les handicaps fonctionnels majeurs, ainsi que pour des changements dans la fonction neurologique et dans l’étendue des lésions visibles par IRM. Le critère principal était d’être en vie et de n’avoir aucune incapacité fonctionnelle majeure 24 mois après la perfusion.

RESULTATS

Un total de 17 garçons ont reçu la thérapie génique Lenti-D. Au moment de l’analyse intermédiaire, le suivi médian était de 29,4 mois (éventail: 21,6 à 42,0 mois). Suite à la greffe, tous les patients avaient des cellules marquées par le gène, sans preuve d’intégration préférentielle près d’oncogènes connus ou d’excroissance clonale. Une protéine ALD mesurable a été observée chez tous les patients. Aucune mort liée au traitement ou de maladie du greffon contre l’hôte n’a été rapportée; 15 des 17 patients (88%) étaient vivants et sans incapacité fonctionnelle majeure, avec des symptômes cliniques minimes. Un patient, qui avait eu une détérioration neurologique rapide, est décédé suite à la progression de la maladie. Un autre patient, qui avait des signes de progression de la maladie à l’IRM, s’était retiré de l’étude pour subir une greffe de cellules souches allogéniques et est décédé plus tard de complications liées à la transplantation.

CONCLUSIONS

Les premiers résultats de cette étude suggèrent que la thérapie génique Lenti-D pourrait constituer une alternative sûre et efficace à la greffe de cellules souches allogéniques chez les garçons atteints d’adrénoleucodystrophie cérébrale à un stade précoce. Un suivi supplémentaire est nécessaire pour évaluer pleinement la durée de la réponse et la sécurité à long terme. (Financé par Bluebird Bio et autres, numéro STARBEAM ClinicalTrials.gov, NCT01896102; ClinicalTrialsRegister.eu number, 2011-001953-10.)

Référence : Eichler, F., Duncan, C., Musolino, P.L., Orchard, P.J., De Oliveira, S., Thrasher, A.J., Armant, M., Dansereau, C., Lund, T.C., Miller, W.P., et al. (2017). Hematopoietic Stem-Cell Gene Therapy for Cerebral Adrenoleukodystrophy. N. Engl. J. Med. Oct 26;377(17):1630-1638

Le syndrome d’Aicardi-Goutières est une affection génétique associée à une activation inappropriée du système immunitaire.
Des preuves de plus en plus nombreuses semblent indiquer qu’une accumulation d’acide nucléique (ARN et ADN), peut-être dérivé d’anciens virus inclus à nos propres cellules, provoquerait une réponse immunitaire orchestrée par l’interféron de type I. Le syndrome d’Aicardi-Goutières est une maladie grave qui nécessite le développement de traitements. La mise au point d’approches thérapeutiques efficaces sera favorisée par une meilleure connaissance de ses mécanismes. Suite à des études de preuve de principe menées chez la souris malade Trex1-nulle et grâce aux connaissances nouvelles concernant les protéines associées au syndrome d’Aicardi-Goutières, les stratégies présentant un intérêt immédiat incluent le blocage de l’interféron de type I et d’autres composants des voies de l’inflammation, l’interruption de la fabrication de produits de “transcription inverse” et une diminution des globules blancs. Il existe déjà des traitements en lien avec chacune de ces possibilités. Nous parlerons en particulier d’un essai clinique d’inhibiteurs de la transcriptase inverse, qui débute en France. Le syndrome d’Aicardi-Goutières n’échappe pas aux difficultés de recrutement pour la réalisation d’études contrôlées portant sur les maladies rares affectant des populations limitées. Il pourrait être utile d’envisager l’utilisation d’une cohorte historique comme population de contrôle dans un essai thérapeutique. C’est pourquoi il est actuellement crucial de prêter une attention particulière à l’évolution naturelle de cette pathologie.De plus, les critères d’évaluation de l’efficacité des traitements doivent être établis et il convient de réfléchir à leur meilleure utilisation possible. Les manifestations de ce syndrome – par ex. observations à l’imagerie et issues cliniques – sont souvent difficiles à mesurer de façon objective. C’est pourquoi il convient d’établir la pertinence et la spécificité des biomarqueurs dans l’optique de ces futurs essais cliniques. De ce point de vue, nous nous intéressons particulièrement à la détection d’une “signature interféron” dans presque tous les cas du syndrome d’Aicardi-Goutières analysés à ce jour.
Un traitement sera très probablement bénéfique aux premiers stades de la maladie. Le diagnostic précoce sera donc d’une importance cruciale. Toutefois, les caractéristiques de la maladie d’apparition plus tardive (p. ex. engelures chez certains patients) font que le traitement aura aussi probablement un rôle à jouer chez certains patients plus âgés. Les incertitudes concernant l’adéquation d’un traitement contre le syndrome d’Aicardi-Goutières en fonction du type génétique commenceront à se dissiper à mesure que notre compréhension de la fonction protéique liée à cette maladie progressera.

Le développement du séquençage à haut débit (Next Generation Sequencing, NGS) dans les années 2000, a marqué un tournant majeur dans les études du génome. La technologie de l’Exome permet de séquencer tous les exons du génome. L’exon constitue la partie du gène qui est traduite en protéines. Les leucodystrophies sont un groupe de maladies génétiques qui affectent la substance blanche et principalement son composant majeur, la myéline. Malgré les avancées faites dans l’identification des gènes, 60 % des patients restent sans anomalies génétiques retrouvées. Nous avons réalisé un séquençage de l’Exome dans une cohorte de 80 patients avec des leucodystrophies de cause indéterminée.

Nous avons identifié la mutation causale dans 56 % de cas, les 44 % restants sont en cours d’analyse avec plusieurs variants candidats. Cette analyse nous a permis de diviser notre cohorte en trois sous-groupes. Un groupe avec des mutations dans des gènes connus de leucodystrophies (15 %), un 2e groupe avec des mutations dans des gènes déjà impliqués dans une autre maladie génétique et avec un tableau clinique très atypique (9 %), et un 3e groupe avec des mutations dans des gènes potentiellement candidats (32 %).

L’identification de mutation dans de gènes connus de leucodystrophies par séquençage de l’Exome a mis en évidence l’intérêt majeur de développer une puce qui regroupe tous les gènes connus de leucodystrophies pour une application diagnostique.

Les leucodystrophies peuvent être définies comme des anomalies génétiques touchant principalement la substance blanche du système nerveux central. Ce sont généralement la myéline et les cellules gliales (oligodendrocytes et astrocytes) qui sont atteints. On observe généralement une détérioration progressive.

Les leucodystrophies peuvent être classées dans 2 groupes principaux : pathologies d’hypomyélinisation et autres pathologies. Les recherches sur les leucodystrophies ont commencé à Amsterdam en 1987, peu après l’introduction de l’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) en médecine. L’IRM s’est avérée être un outil très utile, permettant de distinguer différentes formes de leucodystrophies grâce à des types d’anomalies constants et distincts détectables à l’IRM. Il est vite devenu évident que, chez plus de la moitié des patients (~60 %) présentant une leucodystrophie révélée à l’IRM, il était impossible d’établir un diagnostic spécifique.

Depuis lors, de nombreuses “nouvelles” leucodystrophies ont été définies et les gènes mutés responsables ont été identifiés, dans un premier temps par analyse de liaison génétique et, plus récemment, par séquençage complet de l’exome. La liste qui suit de “nouvelles” leucodystrophies, qui sont d’autres pathologies associées à une anomalie génétique identifiée, est incomplète :

  • Maladie d’Alexander (mutations de GFAP)
  • Vanishing white matter / CACH (EIF2B1-5)
  • Leucoencéphalopathie mégalencéphalique avec kystes souscorticaux / MLC (MLC1 et GLIALCAM)
  • Syndrome d’Aicardi-Goutières (TREX1, RNASEH2B, RNASEH2C et RNASEH2A, RNASET2, SAMHD1, ADAR1 et IFIH1)
  • Défauts de l’ARNt synthétase mitochondriale : LBSL (DARS2), LTBL (EARS2), leucoencéphalopathie liée à AARS2
  • Défauts de l’ARNt synthétase cytoplasmique : HBSL (DARS), leucoencéphalopathie liée à RARS
  • Défaut du canal chlorure ClC-2 (CLCN2)
  • Leucoencéphalopathies mitochondriales (complexe I : NDUFV1, NDUFS1, NDUFS4, NDUFS7, NDUFS8, NUPBL ; complexe II : SDHAF1, SDHA, SDHB; complexe III : LYRM7 ; complexe IV: SURF1, APOPT1 ; autre : NFU1, BOLA3, LIAS, GLRX5)
  • Leucoencéphalopathies peroxysomales (PEX1, PEX2, PEX3, PEX5, PEX6, PEX10, PEX12, PEX13, PEX14, PEX16, PEX19, PEX26, PHYH, PAHX, PEX7, DHAPAT, AGPS, ABCD1)
  • Leucoencéphalopathie héréditaire diffuse à sphéroïdes neuroaxonaux (CSF1R)
  • Leucoencéphalopathie autosomique dominante de l’adulte (LMNB1).

Des développements similaires ont été observés dans le domaine des maladies liées à l’hypomyélinisation, dans lequel de nombreuses nouvelles pathologies ont été définies et les anomalies génétiques responsables ont été identifiées. Il est frappant de constater que, malgré ces progrès incroyables et l’accumulation de connaissances au cours des 25 dernières années, les médecins et les familles continuent à expliquer qu’aucun diagnostic n’est établi chez environ 50 % des patients souffrant d’une leucodystrophie. Il est donc important de s’interroger sur ce qui est réel. Lorsqu’on se penche sur d’anciens ensembles de données concernant des leucodystrophies non classifiées (p. ex. van der Knaap et al., Radiology 1999), la majorité des cas recensés ont aujourd’hui un diagnostic. Les “nouveaux” cas non classifiés sont différents et, au vu des résultats de l’IRM, ne devraient pas être considérés comme correspondant à une leucodystrophie. En effet, nombreux d’entre eux sont des troubles neuronaux primitifs et certains correspondent à des lésions acquises, non-génétiques. La classification incorrecte en leucodystrophie apporte de la confusion pour les patients et leur famille ainsi que pour les médecins et peuvent avoir pour conséquence des efforts inutiles à appliquer des tests inadaptés.

La leucodystrophie liée à l’ARN polymérase III (POLR3- HLD), aussi appelée leucodystrophie 4H, est une leucodystrophie hypomyélinisante entraînant un spectre de manifestations neurologiques et extraneurologiques avec un âge de début typiquement dans la jeune enfance. Plusieurs leucodystrophies décrites dans les années 2000 sont maintenant regroupées sous cette leucodystrophie puisqu’elles ont des caractéristiques cliniques similaires et sont causées par des mutations dans les mêmes gènes : le syndrôme de 4H (Hypomyélinisation, Hypodontie et Hypogonadisme Hypogonadotrope), l’ADDH (“Ataxia, Delayed Dentition and Hypomyelination”), la leucodystrophie TACH (“Tremor-Ataxia with Central Hypomyelination”), la leucodystrophie avec oligodontie et le syndrôme HCAHC (“Hypomyelination with Cerebellar Atrophy and Hypoplasia of the Corpus Callosum”). 

Une grande étude sur plus de 100 patients nous a permis de mieux comprendre le spectre de cette maladie.
Les caractéristiques cliniques neurologiques de POLR3-HLD incluent :

  • des manifestations cérébelleuses importantes (ataxie ou problème d’équilibre, dysarthrie ou difficulté à bien prononcer les mots, dysmétrie ou imprécision des mouvements),
  • avec ou sans tremblement,
  • des manifestations pyramidales telles que spasticité (raideur) et réflexes vifs,
  • ainsi que des manifestations dites extra-pyramidales de type dystonie (raideur dans les bras et les jambes, qui fluctue avec les émotions et postures anormales associées).Les caractéristiques non-neurologiques de la maladie incluent :
  • des anomalies dentaires (exemples : dents petites, dents manquantes, retard d’éruption des dents, anomalies dans l’ordre d’éruption de dents, etc.),
  • des anomalies oculaires (myopie),
  • des anomalies endocriniennes (exemple : petite taille)
  • et des anomalies pubertaires (arrêt pubertaire ou absence de puberté).POLR3-HLD est causée par des mutations récessives dans les gènes POLR3A et POLR3B. Jusqu’à ce jour, plus de 100 patients avec cette maladie ont des mutations dans un ou l’autre de ces gènes. Les gènes POLR3A et POLR3B codent pour les deux plus grandes sous-unités d’une enzyme nommée ARN polymérase III, et, ensemble, forment le centre actif du complexe composé de 17 sous-unités. Aucun patient ne possède deux mutations nulles, c’est-à-dire deux mutations qui entraineraient l’absence complète de la protéine pour laquelle le gène code. En effet, ceci n’est pas surprenant étant donné le rôle primordial de l’ARN polymérase III : la transcription d’ADN codant pour de petits ARNs tels que les ARN de transfert, 5S, U6 et 7SK. Ces petits ARNs sont importants pour la survie de la cellule.

    Les travaux sur le lien entre mutations du gène POLR3A ou POLR3B / leucodystrophie hypomyélinisante sont amorcés. La représentation des mutations trouvées sur modélisation tridimensionnelle de la polymérase III suggère que les mutations peuvent avoir un effet sur l’assemblage de l’enzyme en altérant les interactions entre les sous-unités, ou encore avoir un effet sur la liaison de l’ADN avec le complexe, entrainant par le fait même une transcription anormale de l’ADN en ARN.

    Des résultats préliminaires suggèrent que, au moins pour une mutation, l’hypothèse première semble exacte, c’est-à-dire qu’une mutation dans le gène POLR3A entraine un assemblage déficient du complexe et, dans ce cas, un échec de migration du complexe dans le noyau de la cellule, l’endroit où la polymérase effectue son travail.

    Notre hypothèse est que des mutations dans POLR3A ou POLR3B entraînent une transcription anormale de certains ARNs, tels les ARN de transfert, importants pour le développement de la myéline (myélinisation). Nous avons mis en place plusieurs types d’expériences pour étudier ces petits ARNs à partir de fibroblastes (cellules de peau de patients et de contrôles sains) et il semble qu’il y ait de petites variations dans la transcription de certains ARNs. Cependant, la peau n’étant pas affectée chez nos patients, et possédant maintenant des souris avec des mutations dans Polr3a, nous allons maintenant répéter ces expériences avec la myéline et la substance grise de cerveaux de souris malades.

    À noter que l’implication des ARN de transfert est aussi suspectée dans d’autres maladies héréditaires impliquant la substance blanche cérébrale telles que LBSL (“Leukoencephalopathy with Brainstem and Spinal cord involvement and Lactate elevation”) et dans deux autres leucodystrophies hypomyélinisantes appelées HBSL (“Hypomyelination with brainstem and spinal cord abnormalities and leg spasticity”) et “RARS-associated hypomyelination”, causées par des mutations dans les gènes DARS et RARS, respectivement.

    Enfin, nous avons maintenant débuté les expériences chez la souris Polr3a, présentant des difficultés motrices. Nous allons étudier ses caractéristiques, son cerveau. Cela nous permettra d’avancer sur la compréhension de la pathophysiologie de la maladie.

    La découverte des gènes associés POLR3-HLD a permis à de nombreux patients et leurs familles d’obtenir un diagnostic moléculaire et un conseil génétique approprié. Des études cliniques, radiologiques et physiopathologiques sont toujours en cours afin de mieux comprendre l’étendue des manifestations cliniques et radiologiques, des anomalies génétiques et bien entendu, la pathophysiologie de ce groupe de maladies afin de pouvoir développer des stratégies thérapeutiques.

La maladie de PelizeusMerzbacher (PMD) est une maladie héréditaire affectant le système nerveux central, caractérisée par une atteinte physique et mentale. Dans la majorité des cas, la PMD est due à une augmentation de l’expression du gène PLP1 (gène codant la Protéine Protéolipide 1 ou lipophiline, constituant primaire de la myéline). Il n’existe actuellement aucun traitement curatif pour les patients souffrant de PMD. 

Dans le cadre d’une approche thérapeutique expérimentale, nous avons pu réduire l’expression génique de PLP1. Nous avons pu améliorer l’évolution de la maladie en administrant un antagoniste expérimental du récepteur de la progestérone chez des souris mimant la forme la plus fréquente de PMD.

Afin de faciliter l’application de nos résultats à des patients souffrant de PMD, nous tenterons de répondre aux questions suivantes chez la souris PMD :
Les antagonistes de la progestérone actuellement autorisés dans d’autres indications réduisent-ils l’expression génique de PLP1 ?
Comment pouvons-nous optimiser le traitement pour obtenir les meilleurs effets thérapeutiques possibles ?
Quel est l’impact à long terme d’un traitement agissant sur le récepteur de la progestérone ?
Pouvons-nous identifier d’autres classes potentielles de médicaments permettant de réduire l’expression de Plp1 ?

La leucodystrophie nommée maladie de Canavan (CD, Canavan Disease) est une maladie neurodégénérative. Les patients atteints de la maladie de Canavan présentent un retard mental, souffrent d’épilepsie et décèdent prématurément. L’atteinte cérébrale des patients atteints de CD sont caractérisées par une vacuolisation progressive du système nerveux central (SNC), un oedème et une perte des oligodendrocytes, cellules responsables de la formation de la myéline dans le SNC.

En 1996, la CD fut la première maladie cérébrale neurogénétique à être traitée par thérapie génique. La CD est due à une mutation de perte de fonction du gène codant l’aspartoacylase (ASPA), une enzyme des oligodendrocytes.

Dans des conditions normales, l’ASPA dégrade le N-acétyl-Laspartate (NAA) en aspartate et en acétate.

La conséquence biochimique du déficit en ASPA est une accumulation de NAA et de son dérivé NAAG dans le cerveau, le sang et l’urine. Le NAA est l’acide aminé libre le plus abondant dans le SNC et son rôle dans le cerveau n’est pas entièrement élucidé. Le métabolisme du NAA est extrêmement segmenté : la production de NAA, catalysée par l’enzyme N acétyltransférase 8-like (NAT8l), a lieu dans les neurones, tandis que sa dégradation est restreinte aux oligodendrocytes.

On suppose que l’étiologie de la CD est liée aux effets cytotoxiques et osmotiques du NAA en excès, mais aussi à une hypomyélinisation potentielle due à un manque d’acétate dérivé du NAA. Toutefois, aucune donnée expérimentale n’est venue étayer ces hypothèses.

Afin d’évaluer la contribution du NAA à la pathologie complexe de la CD, nous avons créé et caractérisé des modèles de souris présentant divers niveaux de NAA. Nous montrons ici que, globalement, la perte de fonction de l’ASPA ou l’augmentation du NAA, en elles-mêmes, sont bien tolérées. Toutefois, les oligodendrocytes souffrant d’un déficit en ASPA sont extrêmement vulnérables à la toxicité du NAA in vivo.

Nos données ainsi que plusieurs publications concernant la correction de l’expression génique de l’ASPA dans des neurones montrent la nécessité d’améliorer les moyens d’expression du gène pour une réintroduction ciblée de l’ASPA dans les oligodendrocytes.

Nous avons donc modifié des vecteurs-médicaments pour orienter la thérapie génique par l’ASPA spécifiquement vers les oligodendrocytes de souris symptomatiques déficientes en ASPA.

Nous observons que ce traitement stoppe et inverse la progression de la maladie, mais de manière incomplète. Notre hypothèse est que les approches futures pour la thérapie génique de la CD devront inclure des stratégies visant principalement à restaurer l’expression de l’ASPA par les oligodendrocytes associée à une diminution supplémentaire du NAA.

La leucoencéphalopathie mégalencéphalique avec kystes sous-corticaux (MLC) est une leucodystrophie génétique rare et encore incurable, caractérisée par une évolution lentement progressive entraînant des déficits moteurs et cognitifs ainsi qu’une épilepsie. L’état clinique des patients est souvent aggravé après un traumatisme ou certaines infections. La prise en charge des patients exige un soutien parental, scolaire et social intensif. 

Environ 80 % des personnes atteintes de MLC portent des mutations du gène MLC1 codant une protéine dont la fonction n’est pas encore totalement connue à ce jour ; une minorité des patients (environ 15 %) présente des mutations du gène Hepacam/Glialcam qui code une molécule d’adhésion cellulaire.

Ces deux protéines sont très fortement exprimées dans une population de cellules cérébrales nommées astrocytes. Les astrocytes sont essentiels à l’homéostase et à la fonction cérébrales, notamment au maintien de l’équilibre hydrique et ionique. Des études, menées par notre groupe de recherche et par d’autres, semblent indiquer que MLC1 pourrait réguler l’échange d’ions et d’eau. Nous avons récemment commencé à étudier le rôle de MLC1 dans les processus intracellulaires de contrôle de la réponse des astrocytes aux conditions de stress (stress osmotique, inflammatoire et oxydatif). Les résultats obtenus nous apporterons les connaissances fondamentales permettant d’étudier comment les mutations de MLC1 altèrent la fonctionnalité des astrocytes et entraînent des lésions cérébrales.

Pour cela, nous avons obtenu des cellules souches pluripotentes inductibles issues de fibroblastes cutanés de personnes souffrant de la MLC et nous sommes actuellement en train de les différencier en astrocytes porteurs de mutations pathologiques de MLC. Ce modèle devrait nous permettre d’obtenir de nouvelles informations sur des molécules et sur des voies qui peuvent devenir des cibles pharmacologiques pour restaurer la ou les fonctions des astrocytes et en fin de compte corriger les déficits neurologiques, ce qui ouvrirait la voie au développement de traitements permettant de guérir la MLC ou d’améliorer la qualité de vie des personnes qui en souffrent.

La maladie d’Alexander est une maladie liée à des mutations du gène de la GFAP. Les mécanismes qui font que ces mutations provoquent la maladie ne sont pas encore compris. De plus, l’âge de déclaration, la sévérité des symptômes et la vitesse de progression sont très variables selon les patients, et les données dont nous disposons sont trop limitées pour expliquer cette hétérogénéité. 

Ces dernières années, nous avons publié les résultats de deux études qui tentent de répondre à ces questions en utilisant des modèles de souris de la maladie et des échantillons cérébraux prélevés lors de l’autopsie de patients souffrant de la maladie d’Alexander.

Dans la première étude, publiée l’an dernier dans le Journal of Neuroscience, nous avons identifié un lien potentiel entre les mécanismes responsables de la neurodégénérescence dans la maladie d’Alexander et dans d’autres maladies neurodégénératives plus fréquentes. Ces résultats sont en rapport avec une protéine spécifique nommée TDP-43, régulant l’expression d’autres gènes. Cette protéine était déjà connue dans la sclérose latérale amyotrophique (SLA) et environ 50 % des cas de dégénérescence lobaire fronto-temporale (DLFT), un type de démence dans ces cas désignée par l’abréviation DLFT-TDP. Dans la SLA et la DLFT-TDP, la protéine TDP-43 devient insoluble, elle est modifiée sur le plan biochimique et incorrectement localisée dans les neurones et la glie du cerveau et de la moelle épinière.

La protéine TDP-43 avait été auparavant détectée dans les fibres de Rosenthal de certaines tumeurs cérébrales. Nous avons donc recherché sa présence dans les fibres de Rosenthal caractéristiques de la maladie d’Alexander. Nous avons découvert que la protéine TDP-43 est effectivement altérée et incorrectement localisée dans le cerveau de patients atteints de la maladie d’Alexander ainsi que dans les modèles de souris de la maladie, qui contiennent également des fibres de Rosenthal. TDP-43 focalise désormais l’attention des chercheurs qui travaillent sur la maladie d’Alexander.

Dans le seconde étude, publiée en fin d’année dernière dans Brain Research, nous avons examiné le rôle possible de facteurs environnementaux, tels que des traumatismes crâniens, dans la modification de la sévérité des symptômes des patients souffrant de la maladie d’Alexander. Souvent, les familles et les patients signalent une apparition rapide de nouveaux symptômes ou une évolution rapide de symptômes pré-existants après des blessures à la tête pourtant d’apparence mineure. Un traumatisme crânien est un facteur de risque connu d’épilepsie. A l’aide de nos modèles de souris, nous avons dans un premier temps réalisé des électroencéphalogrammes et découvert que, même en l’absence de blessure, les souris présentent des signes d’épilepsie subconvulsive.

Nous avons ensuite soumis ces souris à des lésions crâniennes légèrement traumatiques, mais suffisamment pour accroître le risque d’épilepsie. Nous n’avons toutefois pas pu montrer que les souris mutantes pour GFAP étaient différentes des souris de contrôle en termes de risque épileptique suite à un traumatisme.

Les sujets de recherche à venir incluent le développement de nouveaux modèles animaux et le développement ou l’identification de médicaments qui pourraient modifier l’évolution de la maladie.

La protéine elF2B joue un rôle important dans le processus cellulaire normal de synthèse protéique et dans sa régulation. La synthèse protéique correspond au processus par lequel les cellules fabriquent tous les composants dont elles ont besoin, en suivant les instructions fournies par le génome (ADN), relayées par une molécule d’ARN messager, et en utilisant les blocs constitutifs nommés acides aminés, qui proviennent de notre alimentation. La protéine elF2B est donc nécessaire partout dans l’organisme. Comme la CACH/VWM n’affecte que certains tissus, on peut en conclure que, de manière générale, les cellules disposent de quantités suffisantes de la protéine elF2B pour fonctionner. Le cerveau et la myéline constituent une exception évidente à cette règle ; ces tissus sont donc particulièrement sensibles à une atteinte de la fonction d’elF2B. Nous n’en connaissons pas encore les raisons.

Actuellement, l’hypothèse la plus largement reconnue découle du rôle connu d’elF2B dans la réponse au stress cellulaire. Différentes études ont montré que la régulation de la protéine elF2B est essentielle aux cellules en réponse à plusieurs agents stressants.

Nous savons que, lorsque le stress est prolongé ou trop intense, les cellules qui ne peuvent résoudre le stress basculent vers un processus nommé mort cellulaire ou apoptose. Dans les modèles expérimentaux, ce processus contribue à provoquer une pathologie similaire à celle qui est associée aux mutations d’elF2B dans la CACH/VWM.

Dans notre laboratoire, nous étudions la fonction de la protéine elF2B à l’aide d’un système de modèle cellulaire simple. Nous avons démontré de manière expérimentale comment elF2 agit comme activateur principal de la synthèse des protéines. La protéine elF2B est une classe de protéines nommée “facteur d’échange de nucléotide guanine (ou GEF)”, agissant comme commutateur moléculaire permettant de commuter vers sa partenaire, une autre protéine nommée elf2. La protéine elF2 se lie au GTP (état activé) et au GDP (état désactivé) et doit être activée au début de chaque cycle de synthèse des protéines. Le GTP est un co-facteur qui fournit de l’énergie. Lorsque la protéine elF2b est active, les cellules peuvent fabriquer des protéines, lorsqu’elle ne l’est pas, le niveau de synthèse protéique chute. Nous avons montré qu’une partie de la protéine elF2B (appelée sous-unité epsilon) dispose de la fonction GEF, tandis que d’autres parties de cette protéine sont importantes pour réguler cette activité en réponse au stress.

Dans le cadre de travaux récents, nous avons découvert que elF2B remplit une seconde fonction apparentée et qu’elle est nécessaire pour déplacer un troisième facteur de traduction (nommé elF5) de elF2 avant que elF2B puisse remplir sa fonction GEF. Nous avons découvert que certaines mutations d’elF2b affectent la fonction GEF tandis que d’autres affectent la fonction de déplacement d’elF5.

Une autre découverte inattendue est le fait que la protéine elF2B est plus grande que nous ne le pensions précédemment. Elle existe dans les cellules sous la forme d’un complexe constitué de deux sous-unités. Nous travaillons actuellement à élucider la structure d’elF2b à l’aide d’une technique nommée cryomicroscopie électronique. Nous espérons que cela nous apportera des éléments importants pour la compréhension de son fonctionnement et de l’effet des mutations sur son fonctionnement.

Dans le cadre de nos études, nous purifions elF2 et des complexes protéiques elF2B à partir de cellules. Nous avons modifié nos méthodes afin de pouvoir produire l’elF2 humaine dans un système d’expression basé sur une cellule de levure. Nous avons démontré que la protéine elF2 que nous produisons fonctionne aussi bien qu’une protéine produite par d’autres moyens plus laborieux et qu’elle peut être utilisée dans un test diagnostique dans le cadre des procédures utilisées pour confirmer qu’un patient souffre de la CACH/VWM. Au cours d’études menées en collaboration avec l’équipe du Pr Odile Boespflug-Tanguy, nous avons utilisé des cellules sanguines isolées chez des patients comme source d’elF2B et notre elF2 humaine pour montrer que les cellules des patients ont une activité elF2b GEF inférieure à celle des sujets témoins sains.

Nous découvrons actuellement de nouveaux éléments intéressants concernant le rôle et la biologie d’elF2B. Nous avons mis au point une stratégie pour purifier elF2. Après quelques modifications, notre dosage biochimique pourra être utilisé avec d’autres tests diagnostiques utilisés à l’hôpital pour confirmer le diagnostic de CACH/VWM.

La maladie de Krabbe ou leucodystrophie à cellules globoïdes (LDG) est une leucodystrophie génétique due à des mutations du gène codant la galactocérébrosidase (GALC). Les deux parents en bonne santé d’un sujet atteint sont porteurs d’un exemplaire d’une mutation pathologique du gène de la GALC.

Lorsqu’une personne hérite de deux exemplaires d’un gène muté, elle présente une activité très faible de la GALC, qui entraîne une accumulation importante de lipides contenant du galactose, présents principalement dans la substance blanche ou la myéline du système nerveux central et périphérique (SNC et SNP). Cette pathologie, outre l’anomalie de la composition lipidique de la myéline, compte aussi une composante inflammatoire.

Bien que la maladie de Krabbe touche principalement des nourrissons, le diagnostic est aussi posé chez des patients plus âgés. Chez certains patients, le diagnostic peut n’être établi que tardivement, lorsque certains symptômes poussent à réaliser un test génétique. Cependant, ce diagnostic tardif risque de limiter la réussite de tout traitement visant à prévenir ou à réparer les lésions du système nerveux.

Afin de permettre un diagnostic plus rapide, certains états des États-Unis ont mis en place un dépistage de la maladie de Krabbe chez le nouveau-né. Certains sujets identifiés dans le cadre de ce dépistage en raison d’une activité réduite de la GALC présentent des mutations causant la maladie et certaines modifications nommées polymorphismes (variations normales du gène pouvant abaisser le niveau d’activité mesuré sans provoquer la maladie).

Le fait de pouvoir déterminer quand et si le sujet sera atteint de la maladie de Krabbe est un point crucial pour la réussite du programme. Une évaluation clinique et des études neurodiagnostiques sont indispensables pour déterminer quand instaurer un traitement. Les options thérapeutiques sont à l’heure actuelle limitées. La greffe de cellules souches hématopoïétiques (GCSH), lorsqu’elle est pratiquée chez le nourrisson très légèrement affecté ou avant apparition des symptômes, permet d’allonger la durée de vie. Cependant, ces patients rencontrent des problèmes importants de langage expressif et des problèmes croissants de marche. Bien que ce traitement soit aujourd’hui considéré comme la norme, il est évident que des traitements plus efficaces sont nécessaires.

Plusieurs modèles animaux présentent aussi une faible activité de la GALC. On les utilise pour tester les différents traitements, pour s’assurer qu’ils sont à la fois sûrs et efficaces, avant de les évaluer au cours d’essais cliniques chez des patients.

De nombreuses études ont été menées sur le modèle de souris appelé twitcher (twi), depuis 1984. Ces études ont porté sur :

  • la greffe de moelle osseuse (GMO),
  • la thérapie génique utilisant différents vecteurs viraux pour fournir un exemplaire correct du gène défectueux de la GALC,
  • l’enzymothérapie substitutive visant à compenser la déficience d’activité de la GALC,
  • des médicaments visant à ralentir la synthèse des galactolipides, à réduire la réponse immunitaire ou à corriger la synthèse de la protéine GALC mutante,
  • la thérapie par cellules souches neuronales pour stimuler la remyélinisation
  • et des associations de ces traitements.Certains traitements n’ont apporté qu’un petit allongement de la durée de vie, d’autres n’ont pas été jugés sans risque pour être utilisés chez des patients.Certaines études ont consisté à injecter différents vecteursmédicaments directement dans le cerveau de souris twi, parfois en association avec d’autres traitements. Avec certains vecteursmédicaments, les gains n’ont été que modestes.

    Nous avons testé un vecteur-médicament de type AAVrh10 contenant le gène de la GALC, nommé AAVrh10-GALC. L’injection de ce vecteur dans le cerveau et dans un vaisseau sanguin (voie intraveineuse, IV) chez des souris âgées de 2 jours (PND2) s’est avérée prometteuse : elle a permis d’allonger significativement la durée de vie des souris traitées (d’environ 40 jours à 150 jours et plus). Ces souris sont fertiles et présentent peu de signes de la maladie jusqu’à un âge très avancé.

    Afin d’alléger les procédures de traitement, nous avons décidé d’injecter le vecteur AAVrh10-GALC en IV à des souris âgées de 10 jours. Nous avons choisi cet âge car, à ce moment-là du développement des souris, la myélinisation des nerfs débute et il est possible d’injecter un plus important volume de vecteur par rapport aux souris plus jeunes. L’injection unique a prolongé la vie des souris en moyenne de 25 à 35 jours comparativement aux souris non traitées, bien que certaines aient vécu plus de 150 jours.

    De plus, cette injection unique a assuré une activité de la GALC au niveau cérébral et médullaire, ainsi qu’une très forte activité au niveau du nerf sciatique, tissu critique non traité par les autres procédures. Ces souris sont restées fertiles, présentaient une mobilité normale, ne souffraient pas de tremblements et leur prise de poids a été normale jusqu’à quelques semaines avant qu’elles ne s’affaiblissent et décèdent. La myélinisation du cerveau, de la moelle épinière et du nerf sciatique s’est avérée normale.

    La GCSH étant le traitement de référence chez les patients atteints de la maladie de Krabbe, nous avons décidé de combiner la GMO à une injection unique du vecteur AAVrh10-GALC réalisée le lendemain chez des souris âgées de 9-10 jours. Ces souris ont un poids normal, des mouvements normaux et certaines vivent actuellement plus de 200 jours.

    Cette approche devra faire l’objet d’études complémentaires, afin de déterminer le temps optimal entre la GMO et l’injection du vecteur AAV et afin de déterminer la dose minimale du vecteurmédicament nécessaire pour délivrer le gène dans les tissus ciblés. Tout cela est en cours d’évaluation dans le modèle de souris.

    Des études sont également en cours dans le modèle du chien, avant de pouvoir valider ces procédures pour pouvoir proposer un essai clinique aux patients atteints de la maladie de Krabbe.

La leucodystrophie métachromatique (MLD) est une maladie neurodégénérative causée par un défaut d’activité de l’enzyme Arylsulfatase A (ARSA), conduisant à l’accumulation de sulfatides dans les cellules du système nerveux central et périphérique, en particulier les cellules fabriquant la myéline, mais aussi les neurones. La forme infantile tardive, forme la plus sévère et la plus fréquente, commence vers 1-2 ans. Elle est caractérisée par une dégradation motrice et cognitive très rapide conduisant à un état grabataire et à un décès précoce. Il n’existe aujourd’hui aucun traitement pour cette forme de la maladie, lorsque les enfants sont symptomatiques.

La thérapie génique intracérébrale pourrait permettre l’expression rapide et soutenue de l’enzyme ARSA dans le cerveau, une condition nécessaire pour arrêter le processus neurodégénératif en temps voulu. Nous avons développé un protocole clinique permettant l’administration par voie intracérébrale d’un vecteur médicament contenant le gène thérapeutique ARSA (AAVrh.10/ARSA). Après avoir validé l’efficacité de ce protocole chez la souris modèle de la maladie, nous avons optimisé et validé chez le primate la procédure neurochirurgicale pour permettre l’administration simultanée du vecteur médicament dans 12 régions du cerveau. Nous avons montré que l’injection du vecteur AAVrh.10/ARSA entraîne une surexpression significative de ARSA dans l’ensemble du cerveau des primates sans aucun effet délétère.

Nous avons obtenu de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé) et du comité de protection des personnes, les autorisations nécessaires pour débuter un essai clinique de phase I-II (tolérance et efficacité) chez des enfants atteints de MLD. Cet essai, actuellement ouvert au recrutement, inclura cinq enfants (âgés de 6 mois à 5 ans inclus) atteints de formes précoces de MLD (infantile tardive, juvénile précoce), au tout début de leur maladie. Des paramètres de sécurité et d’efficacité seront évalués pendant 2 ans, une période qui devrait être suffisante pour évaluer la sécurité et l’efficacité thérapeutique de ce traitement. Les deux premiers patients ont été inclus dans ce protocole clinique et ont reçu le vecteur médicament par voie intracérébrale.

La leucodystrophie métachromatique ou MLD est une maladie de surcharge du lysosome touchant principalement le système nerveux central. Ces maladies constituent une famille de maladies génétiques dues à des enzymes manquantes ou défectueuses. Il est possible de traiter efficacement un grand nombre des symptômes de certaines de ces pathologies par administration intraveineuse d’enzymes de synthèse. Ces enzymes sont de taille relativement importante pour pouvoir passer de la circulation sanguine vers le système nerveux central lorsqu’on les administre par voie intraveineuse. De ce fait, il est improbable qu’elles puissent agir sur les troubles du système nerveux central associés à certaines formes de maladies de surcharge du lysosome dont la MLD. Le laboratoire Shire a conçu un programme de recherche clinique visant à étudier l’administration directe d’arylsulfatase humaine de synthèse, ou rhASA, dans le système nerveux central pour pallier son manque. Cet essai clinique pour la MLD est dans une phase précoce de développement. 

Chez les modèles animaux, l’enzyme rhASA a été détectée dans toutes les zones du cerveau. L’enzyme administrée se dépose dans les lysosomes des oligodendrocytes, les cellules de la myéline du cerveau où s’accumulent anormalement des sulfatides lors de la maladie.

L’administration hebdomadaire de rhASA par voie intrathécale (c’est-à-dire par injection directe dans la zone qui entoure la moelle épinière) dans un autre modèle animal de MLD a permis de diminuer les sulfatides dans le système nerveux central, aussi bien dans la moelle épinière (à proximité du site d’injection) que dans les tissus profonds du cerveau. Ces séries d’expérimentations démontrent que l’administration de rhASA par voie intrathécale permet d’atteindre les tissus cibles du système nerveux central.

Les données issues de ces études sont utiles pour passer à la recherche chez l’homme. Toutefois, les résultats observés chez l’animal ne sont pas automatiquement corrélées à ce qui est observé chez l’homme.

Le laboratoire Shire conduit actuellement un essai clinique pour évaluer l’innocuité d’une forme synthétique de l’ASA chez des patients MLD. Cette étude, outre l’innocuité, évaluera les modifications éventuelles de la motricité grossière et fine, la déglutition, la cognition, du comportement adaptatif et du système nerveux périphérique. Cette étude prévoit une phase d’extension qui permettra d’évaluer l’innocuité à plus long terme et l’effet au niveau clinique. Le laboratoire Shire étudie aussi l’histoire naturelle de la maladie afin de mieux en connaître l’évolution chez des enfants et adultes malades.

En mars 2010, un essai clinique basé sur la greffe de cellules souches hématopoïétiques autologues modifiées par un vecteur-médicament codant l’arylsulfatase A humaine (ARSA) normale a été autorisé par les autorités italiennes. Le protocole clinique inclut des patients souffrant de la forme infantile tardive et juvénile précoce, au stade pré-symptomatique et, pour les patients souffrant de la forme juvénile précoce, au stade pré-symptomatique et symptomatique précoce, car ce profil de patient devrait fournir une perspective raisonnable en termes de bénéfice clinique.

Les objectifs de l’étude sont d’évaluer la sécurité et l’efficacité du traitement en suivant tout effet secondaire et en mesurant les Ateliers scientifiques capacités motrices et cognitives des patients ainsi que la démyélinisation du système nerveux.

Le recrutement de l’étude est aujourd’hui achevé, avec vingt patients inclus (dont dix-neuf ont été traités). Dix de ces patients présentaient des antécédents biochimiques, moléculaires et familiaux compatibles avec un diagnostic de leucodystrophie métachromatique de forme infantile tardive et dix autres des antécédents cliniques et/ou familiaux compatibles avec la forme juvénile précoce de la maladie.

Les données préliminaires indiquent que, globalement, la procédure de greffe a été suivie d’un bon rétablissement de la moelle osseuse sans effets secondaires inattendus à court et moyen terme. De plus, une reconstitution de l’activité de l’ARSA est observée dans les cellules sanguines reconstituées et dans le liquide céphalo-rachidien des patients.

Pour les patients atteints de la forme infantile tardive pour lesquels nous disposons d’un suivi informatif (observation d’au moins 1 an et demi après la thérapie génique), nous rapportons des preuves préliminaires d’un bénéfice thérapeutique associé à la procédure.

En effet, l’état clinique, les capacités motrices et cognitives et la myélinisation du système nerveux central de ces enfants sont très nettement supérieurs aux atteintes attendues compte tenu de l’évolution connue de la maladie dont ils souffrent, de leur âge, et de l’évolution de la maladie de leur frère ou sœur aîné atteint.

L’importance des bénéfices observés peut être influencée par l’intervalle écoulé entre la thérapie génique et la déclaration attendue de la maladie.

Deux patients atteints de la forme infantile tardive traités peu avant la déclaration de la maladie ou au moment de sa déclaration ont présenté quelques premiers signes de la maladie dans les 6-12 mois suivant la thérapie génique, puis ont été stabilisés.

Les patients traités suffisamment longtemps avant l’apparition des symptômes ne présentent pratiquement aucun signe clinique de la maladie, ont un développement moteur et cognitif habituel et bénéficient d’une qualité de vie normale pour leur âge. Nous ne savons pas encore avec certitude si la thérapie génique peut protéger les enfants atteints de la forme infantile tardive de la maladie contre une démyélinisation périphérique.

L’observation des patients présentant la forme juvénile précoce traités à ce jour ne permet pas encore de tirer des conclusions en termes de bénéfice thérapeutique puisque leur maladie était à un stade différent au moment du traitement et en raison d’un suivi court.

Ces données sont globalement très encourageantes, mais devront être confirmées par la poursuite du suivi à long terme.
Nous étudions actuellement avec la société pharmaceutique GSK, un de nos partenaires dans cette recherche, la fondation Téléthon italienne et l’hôpital San Raffaele, la possibilité de mener un programme approprié, conforme à la législation italienne, qui permettrait à d’autres enfants atteints de MLD de recevoir ce traitement, bien qu’il n’ait pas encore reçu d’autorisation de mise sur le marché. Différents points devront être discutés avant de pouvoir proposer un tel programme. Il faudra notamment déterminer si les données préliminaires de cette étude nous permettent d’avoir une balance bénéfices/risques favorable afin de pouvoir proposer ce traitement à des enfants en dehors du cadre d’un essai clinique.

Si cela est autorisé, ce traitement expérimental ne sera pas généralisé, et cette approche thérapeutique devra être évaluée pour chaque patient

Les maladies du spectre de Zellweger (MSZ) résultent d’anomalies touchant les fonctions de structures cellulaires nommées peroxysomes. On les appelle aussi troubles de la biogénèse du peroxysome ou troubles peroxysomaux généralisés.

Au sein de la cellule, le peroxysome remplit plusieurs fonctions importantes nécessaires au bon fonctionnement de divers organes, comme le système nerveux, le foie et les glandes surrénales.

La gravité des maladies du spectre de Zellweger peut varier de relativement modérée à sévère, suivant un continuum d’au moins trois pathologies : le syndrome de Zellweger, forme la plus sévère, l’adrénoleucodystrophie néonatale et la maladie de Refsum infantile, forme la moins sévère. Ces différentes pathologies ont été baptisées à l’origine avant que leurs bases biochimiques et moléculaires n’aient été déterminées.

Le diagnostic des maladies du spectre de Zellweger peut être posé par des examens biochimiques sanguins et/ou urinaires et confirmé par culture de fibroblastes cutanés. Les tests biochimiques spécifiques sont les suivants : dans le sang : les acides gras à chaîne très longue, l’acide phytanique et l’acide pristanique, les acides biliaires, l’acide pipécolique plasmatique, et plasmalogènes de globules rouges ; dans les urines : l’acide pipécolique, les acides biliaires, l’oxalate.

Des mutations de douze gènes PEX différents, codant des peroxines, protéines impliquées dans le transport des enzymes du peroxysome, ont été identifiées dans les maladies du spectre de Zellweger. PEX1 est la cause la plus fréquente des maladies du spectre de Zellweger, présente chez environ 70 % des sujets.

L’évolution clinique de la maladie de Refsum infantile est variable.

Elle peut inclure un retard du développement intellectuel et moteur, une perte d’audition, une atteinte de la vision, un dysfonctionnement hépatique et des anomalies crânio-faciales modérées. La maladie peut attirer l’attention initialement parce que l’enfant échoue à un test auditif et/ou présente des problèmes de vision. Le dysfonctionnement hépatique peut être observé en premier chez un enfant présentant des épisodes hémorragiques provoqués par une anomalie de la coagulation en relation avec la vitamine K. Ces enfants peuvent aussi être atteints d’insuffisance surrénale. L’évolution clinique globale peut être stable, mais la maladie est souvent lentement progressive, avec une détérioration de l’audition, de la vue et de la capacité de marche. Certains sujets peuvent développer une leucodystrophie avec pour conséquence la perte de compétences acquises. D’autres sujets peuvent présenter à l’âge adulte des déficits principalement sensoriels ou seulement une ataxie (mouvements anormaux).

Compte tenu que les sujets souffrant de maladies du spectre de Zellweger peuvent atteindre l’âge adulte, les manifestations cliniques de ces pathologies doivent être surveillées et traitées comme :

  • l’alimentation et la nutrition ;
  • les prothèses auditives ;
  • la correction de la vue ;
  • pour le foie, une supplémentation en vitamines liposolubles ;
  • pour l’insuffisance surrénale, une supplémentation en cortisol.

Des traitements expérimentaux sont à l’étude, comme l’administration d’acides biliaires (acide cholique), d’acide docosahexaénoïque et un régime pauvre en acide phytanique. Jusqu’à présent, le traitement des maladies du spectre de Zellweger reste principalement symptomatique et de soutien.

Des données préliminaires ont montré que le médicament MD1003 pouvait stopper la progression de la maladie chez des patients atteints de sclérose en plaques (SEP) primaire ou secondaire progressive et améliorer leurs symptômes. Parmi les 23 patients souffrant d’une sclérose en plaques progressive traités en moyenne 9,2 mois avec le médicament MD1003, 21 patients (soit 91,3 % d’entre eux) se sont améliorés. Les effets positifs du médicament MD1003 pourraient être liés à une augmentation de la production d’énergie dans les neurones démyélinisés et une stimulation de la réparation de la myéline. L’analyse de deux essais cliniques rassemblant 250 patients souffrant de sclérose en plaques progressive est actuellement en cours et devraient confirmer les résultats précédents.

L’adrénomyéloneuropathie (AMN) et la sclérose en plaques progressive présentent des similarités dont un problème énergétique secondaire conduisant à une dégénérescence axonale progressive. Un patient atteint d’AMN a été traité avec le médicament MD1003 pendant 5 mois et a montré une amélioration clinique comparable aux effets observés dans la sclérose en plaques progressive. Les objectifs de l’essai sont d’évaluer l’efficacité et l’innocuité du médicament MD1003 chez les patients souffrant d’AMN. Soixante patients issus de 4 centres différents (deux en France, un en Espagne, et un en Allemagne) seront initialement divisés en 2 groupes : un groupe de 20 patients recevra un placebo tandis que le deuxième groupe de 40 malades recevra le médicament MD1003. L’étude contre placebo durera 12 mois et sera suivie d’une phase d’extension de 12 mois où tous les patients recevront le médicament. Le critère d’évaluation principal mesurera, avant et après 12 mois de traitement, le changement moyen observé lors du test de marche 2MWT mesurant la distance parcourue en 2 minutes. Les critères d’évaluation secondaires comprendront :

  • le test de marche TW25FW mesurant le temps de marche sur une distance d’environ 8 mètres,
  • le temps pour se lever et marcher (ou test de la chaise chronométrée)
  • les questionnaires sur la qualité de vie Euroqol ED-5D et MOS SF-36
  • un questionnaire sur la fonction urinaire Qualiveen.

Des analyses exploratoires seront également conduites dans certains centres comme des IRMs, la mesure de la vitesse de conduction nerveuse et l’évaluation de la force musculaire. Le recrutement de la totalité des patients sera terminé mi-juin 2015.

L’adrénoleucodystrophie (ALD) liée au chromosome X est la maladie peroxysomale la plus fréquente. Le produit du gène atteint est une protéine membranaire péroxysomale (ADLP), membre de la grande famille des transporteurs ABC (ATP-binding cassette, cassette de liaison à l’ATP) : ABCD1. Le modèle de souris de l’X-ALD, déficient pour la protéine ABCD1, présente une dégénérescence axonale progressive, d’apparition tardive, ressemblant à l’AMN chez l’homme. On observe une apparition précoce du stress oxydatif accompagné de lésions, un an avant la déclaration de la maladie.

Chez ces souris, le traitement par une association d’antioxydants incluant l’α-tocophérol, la N-acétyl-cystéine et l’acide α-lipoïque inverse les lésions oxydatives, améliore le déficit énergétique ainsi que la dégénérescence axonale et l’atteinte locomotrice. Le stress oxydatif semble donc être sous-jacent à la dégénérescence axonale de l’adrénoleucodystrophie ; il est l’une des caractéristiques de la pathogenèse de l’X-ALD.

Notre groupe a contribué à démontrer le déséquilibre en glutathion présent dans le sang de patients atteints d’X-ALD, soulignant ainsi l’importance des formes de déséquilibre du glutathion (sa forme oxydée versus sa forme réduite) comme caractéristique et biomarqueur potentiel de cette maladie.

Plus récemment, un nouveau médicament, nommé EPI-743 (alphatocotriénol quinone), a été conçu pour reconstituer le glutathion sous forme réduite (forme anti-oxydante). Le mécanisme d’action exact d’EPI-743 n’ait pas encore déterminé, mais il a été montré que EPI-743 est un protecteur in vitro puissant des cellules prélevées chez des patients souffrant de maladies de la chaîne respiratoire mitochondriale, comme l’ataxie de Friedreich, le syndrome de Leigh (SURF1) et la neuropathie optique héréditaire de Leber.

Six patients souffrant de la neuropathie optique héréditaire de Leber sont actuellement traités avec EPI-743 dans le cadre d’études thérapeutiques d’urgence menées en ouvert. Des améliorations de l’acuité visuelle, du champ visuel et de la vision des couleurs ont été observées.

Plusieurs patients pédiatriques souffrant du syndrome de Leigh, du syndrome de Kearns-Sayre, de déficience en POLG1, du syndrome MELAS et de l’ataxie de Friedreich sont actuellement traités par EPI-743 dans le cadre d’études cliniques en ouvert. Il a été observé une amélioration clinique associée à celle des biomarqueurs.

Dans un essai de phase 2A récemment achevé, EPI-743 a été associé à des signes d’amélioration neurologique chez 10 enfants inclus atteints d’un syndrome de Leigh.

Notre objectif est de déterminer, dans une étude ouverte, l’efficacité et la sécurité d’EPI-743 chez 10 patients souffrant d’adrénomyéloneuropathie (AMN) liée à l’X.

L’objectif principal de cette étude est d’évaluer l’effet d’EPI-743 administré par voie orale à des sujets atteints d’AMN sur la modification de l’association entre le score clinique de l’ALD de l’adulte (AACS, Adult ALD Clinical Score) et l’échelle de notation de la dépendance (mRS-9Q) entre l’état initial et la fin des 48 semaines de traitement.

Les objectifs secondaires de cette étude sont évalués entre l’état initial et jusqu’à 48 semaines de traitement. Ils consistent à :

  • évaluer la sécurité d’EPI-743 pendant 48 semaines consécutives ;
  • évaluer l’effet d’EPI-743 sur les fonctions motrices (distance parcourue au test de marche de 6 minutes (6MWT), temps nécessaire à parcourir une distance de 25 pieds (T25FW) ;
  • évaluer l’effet d’EPI-743 sur la progression de la maladie évaluée par l’échelle d’amélioration de l’impression clinique globale (CGIIMP);
  • évaluer l’effet d’EPI-743 sur l’évolution de la qualité de vie (questionnaire SF-36) ;
  • évaluer l’effet d’EPI-743 sur l’évolution du potentiel évoqué auditif du tronc cérébral ;
  • évaluer l’effet d’EPI-743 sur l’évolution des taux hormonaux ;
  • explorer l’effet d’EPI-743 sur la modification de composants du cycle du glutathion.